
Système bancaire et financier : Ces facteurs qui freinent le financement de l’économie
Manque de sophistication, asymétrie d’information sur les demandeurs de crédits et taux élevés de défauts de remboursement. Voilà, entre autres, autant de facteurs bloquants d’un financement correct de l’économie en dépit de la profondeur du système bancaire et financier au cours de la dernière décennie. C’est ce que révèle le Rapport national sur la compétitivité de l’économie sénégalaise. Qui précise que le cadre réglementaire, jugé peu attractif, est associé à un accès limité et des coûts élevés du crédit au secteur privé, particulièrement aux petites et moyennes entreprises.
L’accès au financement a été identifié par les dirigeants d’entreprises au Sénégal comme la contrainte majeure de l’environnement des affaires. Le secteur bancaire sénégalais, qui occupe la deuxième place au sein de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa), après celui de la Côte d’ivoire, avec 20 banques en 2009 et plus de 25 % des actifs du système financier de l’Union, n’arrive toujours pas à répondre aux nombreuses sollicitations, surtout des petites et moyennes entreprises (Pme). Ces dernières ont en effet un accès très limité au crédit. En 2008, note le rapport, les grandes entreprises ont bénéficié de 88,1 % des prêts, alors que la part des entreprises de taille moyenne n’a été que de 6,7 % sur un taux de financement de l’économie qui peine à dépasser 24 %. Pis, une récente étude de la Banque mondiale fait état de rejet de 80 % des dossiers de demande de crédit des Pme dû notamment à l’absence d’états financiers formalisés et certifiés par un commissaire aux comptes des demandeurs qui permettrait d’assurer sur la solvabilité du client. Et, le taux élevé de défauts de remboursement noté risque de corser la chose pour les futurs demandeurs qui ont vraiment besoin de ces ressources financières pour démarrer ou s’agrandir, innover ou améliorer leur production. Le rapport explique ainsi la difficulté à laquelle sont confrontées les petites et micro-entreprises pour accéder au crédit par les niveaux de garanties exigés et par les taux d’intérêts élevés.
Entre 2004 et 2008, le taux d’intérêt moyen sur les prêts a été de 12,15 %, relève le rapport. Qui souligne que ce taux est plus élevé au Sénégal qu’en Côte d’ivoire, Tunisie, Afrique du Sud et la plupart des pays de la Cedeao. En 2009, les écarts de taux d’intérêt, c’est-à-dire la différence entre les taux d’intérêt sur les prêts et les taux d’intérêt sur les dépôts, étaient de 11,0 %. Soit près de quatre fois plus élevés qu’en Tunisie et Afrique du Sud. ‘Un tel écart élevé de taux d’intérêt est un indicateur de fonctionnement inefficient du secteur bancaire qui se reflète également dans les niveaux élevés de défauts de remboursement. Ce qui, en retour, pourrait s’expliquer par le manque d’accès à des informations fiables sur les emprunteurs’, souligne le rapport. Non sans faire remarquer que les dépôts dans les institutions de micro-finance ont augmenté de 27,5 % en 2007 et de 14,8 % en 2008. Ces institutions ont détenu, selon la même source, 64 % de tous les comptes de dépôt en 2008. Malgré cela, elles ne fournissent que 8,9 % des crédits octroyés alors que les banques en fournissent 91,1 %.
Les services, le transport et à la communication captent 32 % des prêts
Pourtant, selon le Rncs, réalisé avec l’appui de l’Usaid, le système financier du Sénégal s’est beaucoup amélioré durant la dernière décennie avec une masse monétaire qui est passée de 22,5 % du Pib en 2000 à 33,4 % en 2008. De plus, à la fin décembre 2009, l’offre de monnaie a augmenté de 10,9 % par rapport à l’année précédente. Cela est principalement dû à une augmentation de 13,6 % des dépôts bancaires et à une augmentation de 4,3 % dans la circulation de la monnaie. Néanmoins, la monétisation de l’économie demeure relativement faible comparée à celle de la Tunisie, de la Corée du Sud, de l’Afrique du Sud, de la Malaisie et de la plupart des pays de l’Ocde à revenu élevé. En revanche, l’économie du Sénégal est plus monétisée que celle de la Côte d’Ivoire, du Costa Rica, de la plupart des pays de la Cedeao et de la majorité des pays d’Afrique subsaharienne à revenu moyen inférieur. Le crédit intérieur a augmenté de 55 % entre 2005 et 2009, passant de près de 1 032 milliards de francs Cfa à 1 604 milliards. Cependant, poursuit le texte, en pourcentage du Pib, le crédit intérieur octroyé au secteur privé demeure relativement faible. Quand au crédit net au gouvernement, il représente un faible pourcentage du crédit intérieur net bien qu’étant en hausse sur la période 2006-2009. Il est passé de 28 milliards de francs Cfa en 2006 à près de 112 milliards en 2009 et est estimé à 217 milliards en 2010.
Sur le dispatching du crédit au secteur privé, le Rncs 2011 relève qu’une grande partie est allouée aux services. ‘Entre 2005 et 2009, en moyenne chaque année, près de 32 % des prêts étaient octroyés aux services, au transport et à la communication, 27 % aux industries et 19 % au commerce de gros et de détail’, lit-on dans le document. En outre, la part des prêts aux services, aux transports et à la communication a augmenté régulièrement pour atteindre un pic septennal de 41 % en 2009.
Même si les banques restent les premières sources de financement au Sénégal, le rapport indique que la Bourse régionale de valeurs mobilières (Brvm), commune aux pays membres de l’Uemoa, offre de nouvelles opportunités d’attraction de capitaux étrangers qui permettent aux investisseurs privés de diversifier leurs sources de financement. Mais, le Sénégal ne profite pas assez des financements du marché des valeurs et du capital risque. En effet, signale le Rncs, dans le Rapport sur la compétitivité mondiale (Rcm) 2010-2011, le Sénégal est classé 80ème dans le financement par le marché des actions et une seule entreprise, la Sonatel, est cotée à la Brvm. Cependant, le rang du Sénégal s’est amélioré de 33 places dans la disponibilité de capital risque dans ce même Rcm. En outre, en 2008, le gouvernement du Sénégal a pu lever 285 millions de dollars Us sur le marché financier.

A lire Aussi
